04 avril 2025
Exception d’inexécution et non-paiement du sous-traitant : nécessité pour l’entreprise principale de démontrer l’existence d’un manquement contractuel du sous-traitant
Par un arrêt en date du 6 mars 2025 relatif à un contrat antérieur à la réforme du droit des obligations issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, la troisième chambre civile de la Cour de cassation est venue rappeler que la mise en œuvre de l’exception d’inexécution impose de démontrer l’existence d’un manquement contractuel, s’agissant d’une entreprise principale qui entendait s’en prévaloir pour contester le paiement de sommes dues à son sous-traitant.
Au cas d'espèce :
- le 20 septembre 2013 et le 1er janvier 2015, une entreprise a sous-traité des travaux de charpente et de toiture relatifs à une première opération ainsi que des travaux de vidage des joints de dilatation de bâtiments collectifs relatifs à une seconde opération ;
- invoquant l’absence de paiement de ses situations de travaux, le sous-traitant a assigné l’entreprise principale en paiement.
La Cour d'appel de Basse-Terre (CA, Basse Terre, 24 février 2022, n°21/00861) a condamné l’entreprise principale au paiement de certaines sommes au titre du premier contrat de sous-traitance, considérant qu’elle n’avait pas su démontrer l’existence d’une faute contractuelle du sous-traitant.
Saisie d’un pourvoi de l’entreprise principale, la Cour de cassation est d’abord venue rappeler que la Cour d’appel avait pu souverainement constater :
- d’une part, que l’expertise réalisée mettait en évidence des désordres imputables à l’entreprise principale et un retard de celle-ci dans l’achèvement des travaux antérieur à toute intervention du sous-traitant ; et
- d’autre part, qu’aucun délai d’exécution n’avait été stipulé dans le contrat de sous-traitance, l’entreprise principale n’étant pas en mesure de démontrer la contractualisation d’un planning d’exécution des travaux sous-traités.
Partant, la Cour de cassation vient confirmer l’arrêt d’appel aux motifs « qu'en l'absence de preuve d'un manquement contractuel [du sous-traitant], [l’entrepreneur principal] ne pouvait se prévaloir de l'exception d'inexécution pour refuser le paiement du marché de sous-traitance (…) ».
La Haute juridiction vient ici rappeler sa jurisprudence constante selon laquelle l’exception d’inexécution implique de démontrer l’existence d’un manquement contractuel.
Relevons que cet arrêté ne fait pas état de la condition liée au caractère suffisamment grave du manquement contractuel allégué (Cass. 1ère civ., 19 oct. 1999, n° 97-17.762, Guillemette c/ Sté Dequecker Frères), cette seconde condition étant désormais légalement consacrée à l’article 1219 du Code civil (issu de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des obligations) aux termes duquel « une partie peut refuser d'exécuter son obligation, alors même que celle-ci est exigible, si l'autre n'exécute pas la sienne et si cette inexécution est suffisamment grave ».