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22 novembre 2024

Obligation de solarisation des parkings nouveaux et existants : le décret d’application est paru

Le décret d’application de l’article 40 de la loi APER[1] est enfin paru le 15 novembre 2024[2]. Ce décret permet de fixer les modalités d’application des obligations de solarisation sur au moins 50% de la surface des parcs de stationnements, nouveaux et existants au 1er juillet 2023, de plus de 1.500 m². Une première version du projet de décret avait été soumise à consultation publique durant l’été. Ce décret précise le calcul de la superficie des parkings assujettis aux obligations de solarisation, ainsi que les exonérations mobilisables, et permet de lever certains doutes sur l’application pratique de l’article 40 de la loi APER. Il permet également d’harmoniser, à la suite de premiers retours d’expérience, le régime des nouveaux parcs de stationnement de plus de 500 m², en application de l’article L. 111-19-1 du code de l’urbanisme et de ses textes d’application, afin de le rendre plus opérationnel[3]. Ce décret était particulièrement attendu puisque les obligations s’appliquent notamment aux plus grands parcs existants dès le 1er juillet 2026[4]. Néanmoins, sur certains sujets, son application nécessite encore la publication d’arrêtés à venir.

  1. Le calcul de la superficie des parkings

L’article 1er apporte des précisions bienvenues sur les modalités concrètes de calcul de la superficie d’un parking pour déterminer s’il est assujetti aux obligations de l’article 40 de la loi APER et identifier la surface à couvrir en photovoltaïque :

(i) Les parkings intégrés à un bâtiment[5] sont expressément exclus. Ainsi, les parkings notamment souterrains et en silos ne sont pas assujettis aux obligations de solarisation.

(ii)Comme pour les nouveaux parkings de plus de 500 m2 [6], sont pris en compte dans le calcul de la superficie, au sein du périmètre compris entre la ou les entrées et la ou les sorties du parc :

    • « les emplacements destinés au stationnement des véhicules et de leurs remorques, situés en dehors de la voie publique ». A titre d’information, il s’agit de tous les emplacements de stationnement quel que soit le type de véhicule. Si une place de stationnement a pour objet principal la recharge de véhicule électrique, l’emplacement n’entrera pas dans le calcul de la surface[7],
    • « les voies et les cheminements de circulation », y compris les pistes cyclables et celles pour la circulation des piétons,
    • « les aménagements et les zones de péage permettant l’accès à ces emplacements », par exemple les emplacements des horodateurs.

Au contraire, ne sont pas compris dans le calcul de la superficie :

    • les espaces verts,
    • les espaces de repos (tables de pique-nique, aires de jeux),
    • les zones de stockage (par exemple pour un centre commercial, le stockage des chariots, les espaces de tri de déchets ou de lavage de véhicules),
    • les espaces logistiques, de manutention, de chargement et de déchargement, de livraison, les voies destinées aux services d’urgence et toute voie publique qui traverserait le parking, les emplacements ayant pour fonction principale la recharge de véhicule.

D’autres zones sont exclues du calcul de la superficie, afin de prendre en compte les spécificités de certains parkings qui restent à définir par arrêté : (i) les parties de parcs où stationnent des véhicules transportant des marchandises dangereuses, (ii) les parties situées à moins de 10 mètres d’une ICPE, et (iii) les surfaces nécessaires à la mise en œuvre de prescriptions applicables aux ICPE[8].

L’article 3 précise la faculté de mutualiser les obligations de solarisation pour les parkings adjacents (i.e. les parkings appartenant à la même unité foncière « entendue comme un îlot d’un seul tenant composé d’une ou plusieurs parcelles appartenant à un même propriétaire ou à une même indivision »[9]), qu’ils soient gérés par un seul ou plusieurs gestionnaires, ce qui n’était pas clair à la seule lecture de l’article 40 de la loi APER. Cette mesure permettrait ainsi, en présence de plusieurs parkings assujettis aux obligations, d’installer une seule centrale solaire équivalente aux obligations des deux parkings, et de mutualiser les équipements, notamment les ombrières et le raccordement.

  1. Les exonérations à l’obligation de solarisation

Le décret vient préciser les exceptions prévues à l’article 40 de la loi APER et les enrichir pour tenir compte de certaines caractéristiques des parkings concernés par les obligations, mais réserve encore à un arrêté le soin de les préciser.

Conformément à l’article 4, les exonérations liées aux contraintes techniques et de sécurité sont les suivantes :

  • les contraintes techniques liées à la nature du sol (par exemple, sa composition géologique ou son inclinaison).
  • les contraintes techniques liées à l’usage du parking, s’il est incompatible avec l’installation d’ombrières.
  • l’impossibilité technique de ne pas aggraver un risque naturel, technologique, relatif à la sécurité civile ou nationale. Il s’agit des parcs (i) où stationnent des véhicules transportant des marchandises dangereuses, (ii) constituant une ICPE, et (iii) où stationnent des véhicules motorisés dont le poids total en charge est supérieur à 3,5 tonnes (qui sont en principe soumis aux obligations). Les caractéristiques des parcs seront confirmées par arrêtés.
  • sont également exonérées, les parties des autres parcs de stationnement accueillant des véhicules motorisés dont le poids total en charge est supérieur à 3,5 tonnes, jusqu’à la publication d’un arrêté, qui devrait intervenir au plus tard le 30 juin 2026, approuvant les prescriptions techniques de sécurité définissant les conditions dans lesquelles l’obligation est compatible avec la présence d’infrastructure de recharge pour véhicule électrique pour les véhicules concernés[10]. Il n’est cependant pas clair, à la lecture du décret, si tous les parcs accueillant de tels véhicules sont donc exonérés ou seulement ceux sur lesquels ont été installés ou vont être installés des bornes de recharge pour poids lourds.

L’article 6 exonère également les parkings de l’obligation lorsque des contraintes techniques ou un ensoleillement insuffisant engendrent des coûts d’investissement « portant atteinte de manière significative à la rentabilité » de l’installation, entendue comme « lorsque le coût actualisé de l’énergie produite par cette installation sur une durée de vingt ans est supérieur à la valeur du tarif d’achat ou du tarif de référence utilisé pour le calcul des revenus pouvant être obtenus par la vente de l’électricité produite par l’’installation, multiplié par un coefficient ». Un arrêté devra être pris pour le calcul de ce coefficient ainsi que du coût actualisé et des revenus.

S’agissant des contraintes architecturales, patrimoniales et relatives aux sites et paysages, précisées à l’article 5, sont exclus les parkings qui sont implantés :

  • sur un terrain classé ou inscrit au titre des monuments historiques, dans les abords de ces monuments ou dans le périmètre d’un site patrimonial remarquable,
  • dans un site inscrit ou classé au titre du code de l’environnement c’est-à-dire les « monuments naturels et des sites dont la conservation ou la préservation présente, au point de vue artistique, historique, scientifique, légendaire ou pittoresque, un intérêt général » ou à l’intérieur d’un parc national[11],
  • sur un terrain protégé par le règlement du plan local d’urbanisme (PLU) « pour des motifs d’ordre culturel, historique ou architectural »[12].

Une exonération particulièrement large est également prévue si l’installation d’ombrières photovoltaïques est incompatible avec la préservation de l’environnement, au titre du code de l’environnement.

Quant à l’exonération liée à l’impossibilité de remplir l’obligation dans des conditions économiques raisonnables, les articles 7 et 8 prévoient que ladite obligation n’est pas applicable lorsque le gestionnaire ou le propriétaire peut démontrer :

  • que « le coût total hors taxe des travaux nécessaires pour satisfaire à cette obligation compromet la viabilité économique du gestionnaire du parc de stationnement ou sa capacité de financement initial».
  • « [le] caractère excessif du coût total hors taxe des travaux nécessaires», établi par le dépassement d’un seuil entre le coût total hors taxe des travaux nécessaires pour l’installation d’ombrières photovoltaïques et (i) soit, pour les nouveaux parcs et les rénovations lourdes, le coût total hors taxe des travaux de création ou de rénovation, (ii) soit, pour les parcs existants, la valeur vénale du parc au jour de la demande d’exonération.

Le décret donne plusieurs exemples de coûts des travaux nécessaires pour satisfaire à l’obligation, qui doit être diminuée des revenus obtenus par la vente de l’électricité sur 20 ans ou, si les coûts sont supportés par un tiers investisseur, « le coût des travaux liés à l’installation d’ombrières correspond au reste à charge éventuellement demandé par le tiers-investisseur au gestionnaire ».

Permet de présumer le caractère excessif des travaux, le fait qu’une procédure de mise en concurrence, de sélection ou d’appel à manifestation d’intérêt[13], organisée par le gestionnaire, ait été infructueuse ou n’ait pas suscité de réponse.

Sur l’exonération en cas d’ombrage par des arbres sur au moins la moitié de la superficie du parking prévue par l’article 40 de la loi APER, le projet de décret exonérait les parkings comportant un arbre pour trois emplacements. L’article 9 du décret précise que « ces dispositions ne font pas obstacle à ce que le gestionnaire établisse que les arbres plantés dans le parc de stationnement assurent, d’ores et déjà, l’ombrage de plus de la moitié de sa surface ». Nous comprenons donc que si des arbres assurent l’ombrage sur plus de la moitié de la surface, il n’est pas nécessaire de démontrer l’existence d’un arbre pour trois emplacements.

De surcroît, une exemption temporaire[14] peut être accordée par le préfet de département lorsque la suppression ou la transformation totale ou partielle du parc de stationnement est programmée dans le cadre d’une action ou d’une opération d’aménagement[15] ou d’une zone d’aménagement concerté (ZAC) « dont l’un des lots ou parcelles limitrophes est destiné à une construction susceptible, par son emprise et son gabarit, de relever de l’une des exonérations » prévues par les articles 4 et 6 du décret (i.e. contraintes techniques et de sécurité, contraintes techniques ou ensoleillement insuffisant).

Enfin, l’article 40 de la loi APER prévoit une exonération lorsque des installations de production d’énergies renouvelables équivalentes sans ombrières sont mises en place. L’article 2 renvoie à un arrêté le soin de préciser quelles installations de production d’énergies renouvelables sont visées.

  1. Sur qui pèse la justification de la dérogation

Concernant les modalités de mise en œuvre des obligations, le décret précise d’abord clairement dans sa notice qu’ « en l’absence de gestionnaire, la charge de la justification pèse sur le propriétaire du parc de stationnement ». Cette harmonisation avec les obligations de l’article L. 111-19-1 du code de l’urbanisme permet de lever certains doutes sur les acteurs concernés.

S’agissant des sanctions, le décret confirme que l’autorité administrative compétente est le préfet de département qui doit mettre en œuvre une procédure contradictoire préalable[16].

Bien que cela ne soit pas précisé par le décret, on peut en déduire qu’en l’absence de gestionnaire, le propriétaire du parking serait sanctionné en cas de non-respect des obligations, ce qui n’est pas prévu par l’article 40 de la loi APER ni par le décret.

  1. Modalités de justification des exonérations 

L’article 11 du décret prévoit :

  • pour les exonérations liées aux contraintes techniques (I de l’article 4) et relatives à l’atteinte à la rentabilité de l’installation du fait de contraintes techniques ou d’un ensoleillement insuffisant, à l’atteinte à la viabilité économique du gestionnaire ou de sa capacité de financement initial ou en cas de coût hors taxe excessif des travaux nécessaires (articles 6 à 8) : une attestation comprenant notamment un résumé non technique et une étude technico-économique.
  • pour l’exonération relative à l’impossibilité de ne pas aggraver un risque relatif à la sécurité nationale ou à la mise en œuvre d’une procédure de sélection d’un opérateur infructueuse : un résumé non technique.
  • pour la mise en œuvre des arrêtés relatifs aux ICPE et au transport de marchandises dangereuses : pas de résumé, ni d’étude technique.
  1. Calendrier

En termes de calendrier, le décret, en son article 13, apporte plusieurs modifications aux dispositions réglementaires de mise en œuvre des obligations des articles L. 171-4 du CCH et L. 111-19-1 du code de l’urbanisme s’agissant des parkings nouveaux de plus de 500 m² qui datent pourtant de moins d’un an[17]. Ces modifications s’appliquent aux parkings faisant l’objet de demandes d’autorisations d’urbanisme déposées à compter du 16 novembre 2024, de la conclusion ou du renouvellement, à compter de la même date, d’un contrat de concession de service public, d’une prestation de services ou d’un bail commercial portant sur la gestion du parc.

Une telle harmonisation démontre que les modalités de mise en œuvre des obligations de solarisation doivent être confrontées à la pratique et adaptées aux retours d’expérience des acteurs soumis à ces obligations.

Les dispositions du décret relatives au champ d’application des autorisations d’urbanisme requises pour les installations solaires au sol et les ombrières (non étudiées dans le présent article[18]) s’appliquent, quant à elles, aux demandes d’autorisations d’urbanisme déposées à compter du 1er décembre 2024.

S’agissant des parkings soumis à l’article 40 de la loi APER, l’article 40 prévoyait une application aux parkings existants à compter du 1er juillet 2023 et à ceux dont la demande d’autorisation d’urbanisme est déposée à compter de la promulgation de la loi APER, c’est-à-dire le 10 mars 2023. L’article 15 relatif au calendrier n’a pas modifié ces dates. Pourtant, la notice du décret affirme que le décret s’applique aux parkings existants au 1er juillet 2023 ou dont la demande d’autorisation d’urbanisme est déposée à compter du 1er décembre 2024. La date du 1er décembre 2024 pourrait donc être introduite dans un décret modificatif. En tout état de cause, en l’absence des arrêtés, il n’est pas certain que le décret soit applicable en l’état, sauf si les arrêtés sont publiés avant le 1er décembre prochain.

Il convient enfin de noter que le décret ne prévoit pas de report de la mise en œuvre des obligations, mesure pourtant très attendue par les professionnels.

*

Décret n° 2024-1023 du 13 novembre 2024 portant application de l’article 40 de la loi n° 2023-175 du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables

[1] Loi n° 2023-175 du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables.

[2] Décret n° 2024-1023 du 13 novembre 2024 portant application de l’article 40 de la loi n° 2023-175 du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables.

[3] Voir notre analyse du décret du 18 décembre 2023 et des arrêtés du 19 décembre 2023 sous ce lien.

[4] Pour les parcs dont la superficie est égale ou supérieure à 10.000 m². Quant aux parcs dont la superficie est comprise entre 1.500 m² et 10.000 m², les obligations s’appliquent à compter du 1er juillet 2028.

[5] Au sens du 2° de l’article L. 111-1 du code de la construction et de l’habitation (CCH).

[6] Parkings visés à l’article L. 111-19-1 du code de l’urbanisme.

[7] Guide pour la mise en œuvre de la réglementation relative à l’installation de dispositifs de gestion des eaux pluviales et d’ombrage sur les parcs de stationnement du Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires (voir sous ce lien). Celui-ci n’est pas encore à jour du décret commenté.

[8] L’article R. 111-25-7 du code de l’urbanisme – relatif aux obligations de solarisation et de végétalisation prévues à l’article L. 111-19-1 du code de l’urbanisme – est modifié en conséquence, dans un objectif d’harmonisation.

[9] CE 27 juin 2005, Commune de Chambéry c/ Balmat, n° 264667. Cette définition est également utilisée dans le cadre de l’instruction des demandes d’autorisations d’urbanisme.

[10] Cet arrêté fixera une période de mise en conformité ne pouvant excéder deux ans, qui prendra fin au plus tard le 1er janvier 2028. A défaut de publication de cet arrêté, la période d’exonération prendra fin au 1er janvier 2028.

[11] Articles L. 341-1, L. 341-2 et L. 331-2 du code de l’environnement.

[12] Article L. 151-19 du code de l’urbanisme.

[13] Respectivement au sens du code de la commande publique, de l’article L. 2122-1-1 du CG3P ou de l’article L. 2122-1-3-1 du même code.

[14] Elle est accordée pour une durée de 5 ans prorogeable pour une durée de 2 ans maximum. Les travaux d’aménagement doivent cependant être engagés durant cette période de 5 ans, voire 7 ans. A défaut, la décision accordant l’exemption est caduque et l’obligation de l’article 40 de la loi APER devra être satisfaite dans un délai de 2 ans à compter de cette caducité.

[15] Projet partenarial d’aménagement (PPA), opération de revitalisation du territoire (ORT), opération d’intérêt national (OIN), orientation d’aménagement et de programmation (OAP).

[16] En application du chapitre II du titre II du livre Ier du code des relations entre le public et l’administration (CRPA).

[17] Voir notre analyse du décret du 18 décembre 2023 et des arrêtés du 19 décembre 2023 sous ce lien.

[18] Le décret permet notamment que les installations solaires sur le sol et les ombrières dont la puissance crête est inférieure à 3 kilowatts (kWh) et dont la hauteur maximum au-dessus du sol peut dépasser 1m80, ainsi que celles dont la puissance crête est supérieure ou égale à 3 kWh et inférieure à 3 mégawatts (MW) quelle que soit leur hauteur, puissent bénéficier du régime de la déclaration préalable (DP).

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