21 octobre 2025
Bail commercial : précisions sur le champ d’application du mécanisme de « lissage » de la hausse du loyer résultant d’un déplafonnement
Par un arrêt rendu le 16 octobre 2025, la Troisième chambre civile de la Cour de cassation retient que le mécanisme de "lissage" de la hausse du loyer résultant d'un déplafonnement tel que prévu à l'article L.145-34, alinéa 4 du Code de commerce ne s'applique que dans le cas d'une modification notable des éléments mentionnés aux 1° à 4° de l'article L.145-33 du même Code ou s'il est fait exception aux règles de plafonnement par suite d'une clause du contrat relative à la durée du bail, et non aux baux conclus pour neuf ans et dont la durée, par l'effet d'une tacite prolongation, excède douze ans.
En l’espèce, un bail commercial portant sur des locaux commerciaux a pris effet le 1er octobre 2001, pour une durée contractuelle initiale de neuf ans. En l'absence de congé délivré avant sa date d'expiration, le bail s'est poursuivi par tacite prolongation, pour une durée excédant douze ans. Le bailleur a ensuite délivré au preneur un congé avec offre de renouvellement du bail commercial avec effet au 1er octobre 2014.
Le preneur contestant le montant du loyer proposé par le bailleur, ce dernier a engagé une procédure en fixation du loyer du bail renouvelé. Par arrêt rendu le 21 janvier 2021, la cour d’appel compétente a déplafonné le loyer du bail renouvelé à compter du 1er octobre 2014, au motif que la durée du bail expiré, par l'effet d'une tacite prolongation, a excédé douze ans. Cet arrêt n’a pas fait l’objet de pourvoi en cassation et est donc devenu définitif.
Par la suite, le bailleur a assigné le preneur devant le juge des référés pour impayé de loyers et autres sommes dues au titre du bail. Le juge des référés a fait droit à la demande du bailleur et a estimé que le bail a été prolongé pendant une durée supérieure à douze ans, de sorte que les dispositions de l’article L.145-34 du Code de commerce ne s’appliquaient pas.
Le preneur a interjeté appel de cette décision, revendiquant l’application du mécanisme de "lissage" de la hausse du loyer de renouvellement résultant du déplafonnement tel que prévu au dernier alinéa de l’article L.145-34 du Code de commerce.
La cour d’appel compétente n'a pas fait droit aux demandes du preneur, considérant qu’il « résulte de la lecture même de l’article L.145-34 du code de commerce […] que le dispositif prévu en cas de déplafonnement du loyer ne s’applique que dans le cas d’une modification notable des quatre premiers éléments composant la valeur locative ou lorsque la durée du bail est contractuellement supérieure à 9 ans, et non aux baux de 9 ans qui se sont poursuivis, par l’effet de la tacite prolongation, pendant plus de 12 ans, bien que se trouvant, de ce fait, soumis au déplafonnement, ce qui en est la cause ».
Le preneur s’est alors pourvu en cassation, en soutenant notamment que la variation de loyer d’un bail commercial, dans toutes les hypothèses de déplafonnement du loyer, ne peut conduire à des augmentations supérieures, pour une année, à 10% du loyer acquitté au cours de l’année précédente.
La Cour de cassation confirme que le mécanisme de "lissage" de la hausse du loyer résultant du déplafonnement tel que prévu au dernier alinéa de l’article L.145-34 du Code de commerce ne s’applique que dans deux hypothèses :
- en cas de modification notable des quatre premiers éléments composant la valeur locative ; ou
- lorsque la durée du bail est contractuellement supérieure à neuf ans.
En revanche, ce mécanisme ne s’applique pas aux baux conclus pour neuf ans et dont la durée, par l’effet d'une tacite prolongation, excède douze ans, bien qu'un tel bail se trouve, de ce fait, soumis au déplafonnement.
La Haute juridiction rejette donc le pourvoi du preneur, confirmant que le "lissage" du déplafonnement n’est pas applicable dans cette hypothèse, conformément aux dispositions du dernier alinéa de l’article L.145-34 du Code de commerce.