26 septembre 2025
Manquement à l’obligation de délivrance : la mise en demeure n’est pas une condition préalable à la mise en œuvre de l’exception d’inexécution par le locataire
Par un arrêt du 18 septembre 2025, la troisième chambre civile de la Cour de cassation précise que la mise en demeure du bailleur de satisfaire à son obligation de délivrance n'est pas une condition préalable de mise en œuvre par le locataire de l'exception d'inexécution sous l'égide de l'article 1184 ancien du Code civil.
En l’espèce, une société bailleresse avait donné à bail à un locataire un local commercial pour une durée de 23 mois, prévoyant une indemnité de pas-de-porte en cas de conclusion d’un bail commercial. À l’issue de cette période, la locataire est restée dans les lieux sans nouveau contrat ni versement de l’indemnité.
Assignée par le bailleur en paiement de loyers et d’indemnité, la locataire a opposé une exception d’inexécution, invoquant des infiltrations d’eau ayant affecté l’exploitation du local, et a sollicité des dommages-intérêts pour manquement à l’obligation de délivrance.
La troisième chambre civile de la Cour de cassation rappelle que l’exception d’inexécution, prévue par l’article 1184 ancien du Code civil, peut être invoquée par le preneur dès lors que le bailleur manque à son obligation de délivrance, notamment lorsque le local est rendu impropre à l’usage convenu, sans qu'une mise en demeure préalable du bailleur soit nécessaire.
Elle casse donc l’arrêt de la Cour d’appel de Fort-de-France qui avait exigé une mise en demeure préalable à la suspension des paiements. Selon la Haute Juridiction, la suspension du paiement des loyers par le preneur est possible dès la survenance du manquement du bailleur, sans formalité supplémentaire.
Il convient de noter que la décision est fondée sur l’article 1184 ancien du Code civil, applicable en l’espèce, tout en soulignant que l’article 1219 actuel régissant l'exception d'inéxecution depuis l'ordonnance du 10 février 2016 ne prévoit pas davantage d’obligation de mise en demeure préalable pour invoquer l’exception d’inexécution.
Cet arrêt confirme la position jurisprudentielle ancienne de la Cour de cassation selon laquelle : « celui qui oppose l' exception non adimpleti contractus n'est pas tenu à une mise en demeure préalable » (Cass. com., 27 janv. 1970, n° 67-13.764).